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La 3ème révolution industrielle va t elle sauver la planète ?

En 2010, le poids des 388 plus grosses fortunes égalait celui des richesses cumulées de la moitié de la population mondiale. En 2016, 62 êtres humains les plus riches possèdent autant que la moitié la plus pauvre de la planète, soit 3,6 milliards d’individus.

À cette réalité économique désespérée s'ajoute l'accélération du changement climatique, provoqué par l'émission croissante des gaz à effets de serre. Les climatologues indiquent que la concentration atmosphérique en dioxyde de carbone, qui avait augmenté de 180 à 300 parties par million (ppm) au cours des 650.000 dernières années, est passée de 280 ppm à la veille de l'ère industrielle à 400 en 2013. La concentration atmosphérique en méthane et en oxyde d'azote, les deux autres principaux gaz à effet de serre, présente les mêmes caractéristiques de croissance. 

Lors du sommet de Copenhague sur le changement climatique, en décembre 2009, l'Union européenne a proposé que l'ensemble des pays limitent la hausse de la température à 2°C. Une hausse de 3,5°C nous ramènerait à la température qui régnait sur Terre au Pliocène, il y a plusieurs millions d'années, ce qui aurait des conséquences dévastatrices sur l'écosystème et l'humanité.

La proposition de l'Union européenne est restée lettre morte. Six ans plus tard, l'utilisation à outrance des combustibles à base de carbone a rejeté dans l'atmosphère bien plus de dioxyde que les précédents modèles le laissaient supposer. La hausse probable de la température n'est désormais plus de 2°C, mais de 4,8°C d'ici à 2100. Des températures que l'on n'avait pas observées depuis des millions d'années (n'oublions pas que l'homme moderne - au sens anatomique du terme - est apparu il y a environ 195 000 ans.)

Ce qui rend ces pics de température si effrayants, c'est qu'une telle hausse modifiera radicalement le cycle hydrologique de la planète. En raison des vastes quantités d'eau présentes sur Terre, les écosystèmes ont évolué au fil du temps avec les cycles de précipitations. Chaque augmentation de 1°C de la température équivaut à une hausse de 7% de la capacité de rétention d'humidité de l'atmosphère. La façon dont l'eau retombe sous forme de pluie s'en trouve radicalement modifiée, avec des précipitations plus intenses, mais moins durables et moins fréquentes. Les conséquences s'en font déjà sentir sur les écosystèmes à travers le monde, avec des hivers plus rigoureux, des crues et des tempêtes printanières plus spectaculaires, des sécheresses estivales prolongées, des feux de forêts plus fréquents, des ouragans plus violents (de catégorie 3, 4 et 5), une fonte de la calotte glaciaire, et la montée du niveau des océans.

Les écosystèmes terrestres, qui ne peuvent s'adapter aussi rapidement à un tel changement dans le cycle de l'eau, sont soumis à un stress croissant et certains sont sur le point de s'effondrer. La déstabilisation de ces écosystèmes a amené la biosphère au bord de la sixième extinction de masse en 450 millions d'années. Lors de chacune des cinq extinctions précédentes, le climat a atteint un point de non-retour, entraînant les écosystèmes dans un cercle vicieux qui a conduit à une destruction rapide de la biodiversité. Il a fallu en moyenne dix millions d'années pour récupérer la biodiversité perdue. Les biologistes estiment que la moitié des espèces terrestres pourraient disparaître d'ici la fin du siècle actuel. Il en résulterait une nouvelle ère stérile qui pourrait durer des millions d'années. James Hansen, ex-directeur du Goddard Institute for Space Studies de la NASA, prévoit une hausse de température de 4°C d'ici à la fin du siècle - et, par conséquent, la fin de la civilisation telle que nous la connaissons. Selon lui, le seul espoir réside dans la réduction de la concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, de 400 à 350 ppm au moins.

Les survivants du typhon hawaiien construisent un camp sur les ruines de leur quartier à la périphérie de Tacloban, aux Philippines. (AP/David Guttenfelder)

Le paradigme économique qui est en train d'émerger va modifier de façon spectaculaire la façon dont la vie économique s'organise sur Terre. L'Union européenne emprunte un chemin audacieux - intitulé Europe numérique - pour créer une économie numérique high-tech, intelligente et écologique, qui pourrait faire de ce continent l'espace commercial le plus productif et la société écologique la plus durable de la planète au XXIe siècle. La Chine et de nombreux pays en voie de développement ont aujourd'hui adopté cette vision européenne d'une économie écologique et numérique. 

La numérisation de l'Europe va bien au-delà de le haut débit pour tous, le wifi gratuit et l'échange de mégadonnées. L'économie numérique va révolutionner tous les secteurs du commerce, perturber le fonctionnement de la quais totalité des industries, mais aussi engendrer des opportunités économiques sans précédent, remettre des millions de personnes au travail, démocratiser la vie économique et créer une société plus durable dont la faible émission de carbone permettra d'atténuer le changement climatique. Tout aussi important, cette nouvelle aventure économique s'accompagne d'une nouvelle prise de conscience de la biosphère, au moment où l'espèce humaine se met à percevoir la Terre comme une communauté indivisible. Chacun d'entre nous commence à se responsabiliser en tant que gardien des écosystèmes planétaires qui assurent la survie de l'humanité.

Pour bien saisir l'énormité du changement économique qui se met en place, il faut comprendre les forces technologiques qui ont donné naissance aux nouveaux systèmes économiques à travers l'Histoire. Un grand paradigme économique a besoin de trois éléments, dont chacun interagit avec l'autre pour permettre au système de fonctionner comme un tout: de nouveaux modes de communication pour gérer plus efficacement l'activité économique, de nouvelles sources d'énergie pour stimuler plus efficacement cette activité, et de nouveaux modes de transport pour que les déplacements soient plus efficaces.

Au XIXe siècle, la presse à vapeur et le télégraphe, le charbon en abondance et les locomotives ont déclenché la première révolution industrielle. Au XXe siècle, l'électricité, le téléphone, la radio et la télévision, le pétrole bon marché et les véhicules à combustion interne ont, tous ensemble, ouvert la voie à une deuxième révolution industrielle.

La troisième révolution industrielle

Aujourd'hui, l'Europe jette les bases de la troisième révolution industrielle. Un internet de la communication numérique, un internet de l'énergie durable et numérique et un internet du transport et de la logistique se sont combinés pour créer l'internet des objets. Chaque appareil, chaque application sont dotés de capteurs leur permettant de communiquer entre eux et avec les internautes, tout en fournissant des données en temps réel sur la gestion, la stimulation et le déplacement de l'activité économique dans une Europe numérique intelligente. Actuellement, des milliards de capteurs intégrés à des flux de ressources, des entrepôts, des réseaux routiers et d'électricité, des chaînes de production, des bureaux, des maisons, des magasins et des véhicules suivent en permanence leur état et leurs performances et transmettent ces données à l'internet de la communication ainsi qu'à celui de l'énergie, du transport et de la logistique. D'ici à 2030, on estime à plus de cent trillions le nombre de capteurs qui relieront les hommes à leur environnement naturel dans un réseau intelligent mondial. Pour la première fois dans l'Histoire, tous les êtres humains sont capables de collaborer directement les uns avec les autres, démocratisant ainsi la vie économique.

La station terrestre de télécommunications par satellite de Raisting, en Allemagne, travaille avec les organisations humanitaires, les Nations Unies et les marchés émergents. (Sean Gallup/Getty Images)

La numérisation de la communication, de l'énergie et des transports soulève également des risques et des défis: comment garantir la neutralité du réseau, empêcher de nouveaux monopoles industriels, protéger la vie privée, assurer la sécurité des données et déjouer la cybercriminalité et le cyberterrorisme? La Commission européenne a déjà commencé à apporter des solutions en instaurant le principe d'intégration de la protection de la vie privée et des données, et de la sécurité des informations, dans l'internet des objets.

Dans cette économie numérique étendue, les entreprises privées connectées à l'internet des objets peuvent utiliser les mégadonnées et les outils d'analyse pour développer des algorithmes visant à améliorer l'efficacité, augmenter la productivité et réduire massivement le coût marginal que représentent la production et la distribution de biens et de services, rendant ainsi le commerce européen plus compétitif sur le marché mondial post-carbone naissant.

Le coût marginal de certains biens et services dans une Europe numérique, sera même proche de zéro, permettant à des millions de "prosommateurs" connectés à l'internet des objets de produire et échanger entre eux des biens pour presque rien dans une économie de partage croissante. On voit déjà une génération numérique produire et partager la musique, les vidéos, les blogs d'actualités, les réseaux sociaux, les e-books gratuits, une multitude de cours universitaires gratuits en ligne et d'autres biens virtuels pour un coût marginal quasiment nul. Ce phénomène a mis l'industrie de la musique à genoux, ébranlé celle de la télévision, mis sur la touche les journaux et les magazines et paralysé le marché de l'édition.

Si de nombreuses industries traditionnelles en souffrent, le coût marginal quasi nul a permis l'éclosion d'une pléthore de nouvelles sociétés à forte culture d'entreprise, comme Google, Facebook, Twitter, YouTube et des milliers d'autres sociétés en ligne, qui génèrent les profits par la création de nouvelles applications et la mise en place de réseaux permettant à l'économie du partage de prospérer. 

Les économistes reconnaissent l'effet retentissant de ce coût marginal quasi nul sur les industries des biens d'information. Mais, jusqu'à peu, ils faisaient valoir que les gains de productivité de l'économie numérique ne passeraient pas le pare-feu séparant le monde virtuel de celui de l'économie traditionnelle de l'énergie et des biens et services. Or, une brèche a désormais été ouverte. En constante évolution, l'internet des objets va permettre aux entreprises classiques aussi bien qu'aux millions de "prosommateurs" de produire et distribuer leur propre énergie durable, et d'utiliser des véhicules électriques sans conducteur et des véhicules à pile à combustible par le biais de services de partage automatisés. Ils pourront aussi fabriquer un éventail de plus en plus large d'objets et d'autres biens imprimés en 3D à un coût marginal très faible dans l'économie d'échange, ou à un coût marginal quasi nul dans l'économie de partage, comme ils le font aujourd'hui avec les biens d'information.

 

 
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